Franco Vielma Une vue d’ensemble d’abord: pour les
droites vénézuélienne et transnationale, la stabilité politique est un
vrai problème car elle permet au gouvernement élu (Maduro) de travailler
et d’approfondir cette étape de la révolution. D’où la nécessité
d’accélérer l’offensive de la pénurie économique, la confrontation
politique, la construction du récit de “l’explosion sociale”, la
confrontation des pouvoirs institués, la violation des normes du Centre
National Électoral pour
en español Acelerar el conflicto y propiciar el golpe antes de que la economía mejore aqui
Sur le plan économique, la
contre-offensive du camp bolivarien amène des nouveautés qui, même si
elles ne sont pas dûment visibilisées (par l’ensemble de la classe
politique) préparent une nouvelle donne à moyen terme.
C’est dans l’économique que se trouve le
noyau du malaise, au bout de trois ans d’une guerre économique dure
aggravée par la chute mondiale des cours du pétrole. C’est donc en 2016
que les acteurs du putschisme espèrent enfin mener à bien leur coup
d’État sur la base politique du mécontentement et de la fatigue.
De nouvelles perspectives d’amélioration
de la situation économique apparaissent cependant, qui trouvent leur
origine principale dans les actions du gouvernement Maduro. La droite
comprend le risque de voir ces actions produire leurs effets. Voyons:
- Le prix du pétrole: après les mois catastrophiques de février et de mars 2016, les cours du pétrole connaissent une remontée qui pourrait atteindre un niveau d’équilibre autour des 50 dollars par baril suivant les indicateurs Brent et WTI.
Bien que ce prix reste très bas, il
marque une rupture avec le niveau de 10 ou 20 dollars auquel aurait pu
stagner le baril cette année, ce qui aurait mis en faillite toute
l’économie des hydrocarbures. Même dans les conditions instables du
marché, c’est une bonne nouvelle pour le Venezuela.
Si ce niveau se maintient, l’impact de
ce prix encore modeste se fera sentir au cours du second semestre lors
de l’entrée des revenus générés par ce nouveau prix.
- La gestion de la dette en devises: Le président Maduro a expliqué que dans les 20 derniers mois le Venezuela a honoré ses paiements de dette, pour plus de 35 mille millions de dollars. Malgré ce respect strict des engagements, les agences de notation internationales continuent à élever de manière démesurée le “risque pays”, provoquant et générant de fait un blocus financier. Cependant le ministre Miguel Pérez Abad a déclaré à Reuters que le Venezuela a convenu de meilleures conditions de paiement et a signé de nouveaux contrats financiers avec la Chine.
Le Ministère des relations Extérieures
chinois a annoncé le mardi passé qu’il est parvenu à un accord avec le
Venezuela pour renforcer sa coopération financière. Sur cette alliance
avec la Chine, Abad a précisé qu’elle est adaptée « aux nouvelles
conditions, ce qui va insuffler au pays un oxygène très important pour
avancer ».
Le réaménagement de la dette n’est pas une situation
totalement nouvelle: quand il était à la tête de la Banque Centrale du
Venezuela, Nelson Merentes avait déjà évoqué la possibilité de mettre en
place des swaps en or ou tout autre instrument. C’est le cas
avec les titulaires de bons émis par la compagnie pétrolière publique
PDVSA. La recherche de nouvelles sources pour le paiement des
engagements allègera la pression sur les liquidités très affaiblies
cette année.
- Certification et monétisation des réserves de l’Arc Minier: dans quelques mois seront rendues publics les résultats de l’évaluation des réserves de l’Arc Minier. Une fois certifiées, ces réserves pourront être monétisées, avec pour résultat immédiat l’attraction de nouvelles devises à travers les investissements étrangers.
Mais la Nation peut aussi mettre en
œuvre l’émission de bons payables à terme en or (ou en autres minéraux),
ce qui implique une entrée rapide de devises qui peuvent contribuer en
grande partie à atténuer la chute des revenus en dollars suite à la
chute du pétrole. Pour notre économie hautement dépendante
d’importations de biens et de matières premières, la mise en route
rapide de ces sources alternatives est une bonne nouvelle.
- Investissements focalisés sur des leviers de la production nationale: Un des aspects favorables de la conjoncture est la conjugaison d’une politique pertinente et cohérente de substitution des importations et de la diversification des exportations, en partant de la capacité installée dans le pays. L’investissement « par acuponcture financière » vise à recapitaliser des secteurs comme l’alimentation et la santé, ce qui limite la pression sur les devises pour les importations (une variable de l’extraction de devises, de la spéculation et de la fraude dans le cadre de la guerre économique) et favorise la rotation de produits nationaux.
L’effort en faveur de la production
nationale transversalise l’économie. L’usage des ressources financières
se met en place de manière planifiée, de manière pragmatique, sur la
base d’une méthodologie plus efficace, avec des accords directs entre
l’État et certains acteurs économiques à toutes les échelles, des
grandes entreprises privées jusqu’aux entreprises d’État ainsi que des
entreprises du tissu communal.
On construit une administration de ressources sur la base de résultats.
Le rôle de l’État étant de superviser et d’inspecter rigoureusement les
secteurs concernés pour qu’ils remplissent les objectifs prévus de
productivité. En plus de préserver des devises, la production nationale
fait du bien en profondeur sur l’approvisionnement du marché avec
beaucoup d’autres articles.
- Contention de la tempête du dollar parallèle: Une partie des accords passés au sein du Conseil de l’Économie Productive est le rejet par certains acteurs économiques (pas les importateurs) de matières premières qui se basent sur le taux du DolarToday, ce qui limite la tendance à la hausse, clairement spéculative, que ce taux a généré. Bien qu’il reste un marqueur important de la spéculation et des prix commerciaux et qu’il continue à affecter le pouvoir d’achat des vénézuéliens, le DolarToday stagne à 1000 bolivars pour un dollar et perd de sa force après avoir occasionné des dommages brutaux aux acteurs économiques.
- Avec l’arrivée des pluies, viendront les grandes récoltes: La complexité de la conjoncture vénézuélienne provient également de deux années de grande sécheresse et de faibles pluies. Son impact le plus médiatisé sont les coupures d’électricité et les réductions d’horaire dans l’administration publique en vue d’économiser l’énergie générée par des barrages victime du faible étiage. Cette mesure sera levée dans quelques semaines et les pluies sont d’une énorme importance dans la production d’aliments stratégiques sur le plan national.
De nombreux produits au Venezuela sont
soumis aux conditions d’irrigation, des céréales telles que le riz et le
maïs dépendent des cycles hydriques et les grandes récoltes dépendent
des pluies. Les pluies de cette année auront donc un impact positif sur ces productions dont la circulation se fera sentir dans la seconde moitié de l’année.
- Nouveau système de prix: c’est un thème polémique et sujet à de longs débats. Il y a beaucoup de facteurs en jeu. Pour commencer admettons que l’actuelle conjoncture économique vénézuélienne met fin à une période de plus de dix ans de prix artificiellement bas maintenus grâce aux différentes subventions directes et indirectes de l’État. Beaucoup de produits sujets à de fortes baisses d’inventaire sont dérivés de matières premières importées au dollar préférentiel. Ce qui explique les prix de produits comme le fameux Pantène à 37 bolivars, ou le dentifrice Colgate à 40 Bolivars, ou le paquet de couches-culottes Huggies à 100 bolivars.
Pendant des années nous avons été
nombreux à ne pas reconnaitre l’effort de l’État pour protéger la
population avec ces subventions. La situation a changé. Nous ne
disposons pas d’une réserve énorme de devises pour effectuer des achats
massifs de matières premières et pour produire à grande échelle ces
produits à des prix artificiellement bas, ce qui en a fait la proie
d’aspects sanglants de la guerre économique tels que la contrebande, le
méga-accaparement, le méga-détournement et la méga-revente liés à
l’induction de la micro-revente, des files d’attente et des asymétries
dans la distribution.
La « mise à niveau » réaliste des prix
de nombreux produits (précisément ceux qui subissent le plus de pénurie
organisée) implique que les nouveaux prix stimulent la production et la
circulation de nombreux produits. Certains resteront subventionnés, leur
prix sera plus élevé qu’avant, mais ils se verront favorisés dans leur
circulation. Pérez Abad a dit que « le
second semestre de 2016 sera meilleur que le premier, tant en ce qui
concerne les niveaux d’approvisionnement que de perception économique ».
- Le nouveau modèle d’approvisionnement populaire: pour les acteurs de terrain du sabotage économique, la transformation de la nature du modèle de distribution est plus qu’une menace. Le renforcement des Comités Locaux d’Approvisionnement et de Production (CLAP) dans les secteurs populaires, à travers les conseils communaux, l’introduction de plus de produits et la régularisation de nouvelles formes de distribution vont s’accélérer et s’approfondir dans les prochains mois. Chaque semaine des milliers de tonnes supplémentaires de produits sont distribuées par les CLAP à seulement trois mois de leur naissance. Cette modalité a l’avantage de protéger la population face aux asymétries et aux irrégularités de la distribution, et limite la spéculation qui affecte des produits essentiels.
Dans la lutte contre trois ans de guerre économique, les CLAP ne sont pas la solution définitive et totale mais constituent un facteur d’un poids énorme
comme réponse au chaos. Leur importance vient de qu’ils ont un impact
au-delà de leur objectif économique. Ils relancent l’économie solidaire
au service des gens, revitalise le tissu politique chaviste, surmonte la
logique de l’économie cannibale de guerre, impose la gouvernance d’État
en faveur de mécanismes participatifs pour la distribution et confère
au peuple un rôle vital dans la contre-offensive.
Source ICI
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