Je suis heureux de rencontrer une telle assemblée de patriotes en cette
nuit bénie du Ramadan, cette « Nuit du Destin » [Laylat
al-Qadr: nuit de l’avènement de la prophétie], qui nous
conforte dans notre volonté de rester unis autour du bien, de
l’amour de la patrie, et du pacte sans cesse réaffirmé pour sa
défense avec encore plus de détermination malgré tous les défis
et quels que soient les dangers.
Aujourd’hui,
nous sommes réunis pour honorer la mémoire de tous ceux qui ont
sacrifié leur vie pour que la nation gagne en dignité, pour que la
parole soit celle de la vérité, pour qu
notre
solidarité entoure leurs familles qui ont perdu ce qu’elles
avaient de plus précieux alors
qu’ils empruntaient le chemin de la gloire et de la fierté, sans oublier tous ceux qui sont désormais dans le besoin et affrontent avec foi et ténacité les fardeaux qui s’accumulent jour après jour
qu’ils empruntaient le chemin de la gloire et de la fierté, sans oublier tous ceux qui sont désormais dans le besoin et affrontent avec foi et ténacité les fardeaux qui s’accumulent jour après jour
Nous
sommes réunis pour leur témoigner notre solidarité en leur
assurant que la patrie n’abandonne pas ses enfants dans les
épreuves et les difficultés mais, au contraire, elle les soutient
tant sur le plan moral que sur le plan financier. Nous ne sommes pas
là pour célébrer une fête, d’une part parce que la tristesse et
la désolation n’ont épargné aucune maison et aucune âme de ce
pays, d’autre part parce que le mois de Ramadan n’est pas
nécessairement propice à la fête comme le voudraient certains
rituels.
C’est
un mois de recueillement et d’adoration destiné à se purifier
l’âme des impuretés accumulées toute l’année, un mois
consacré à s’éduquer et à revoir ses comportements pour les
corriger ou les récupérer, un mois pour restaurer son humanité et
en témoigner en s’occupant des autres, de ceux qui ont faim et de
ceux qui endurent toutes sortes de souffrances partout en Syrie.
Oui
le mois de Ramadan est un mois de compassion, mais c’est aussi un
mois de pardon, de dialogue, de sacrifice et de Jihad au sens propre
de ce terme ; celui qui dicte de travailler, d’aimer, de se
construire, de se réaliser, et que je résumerai en disant que c’est
le mois de la régénération du corps et de l’esprit. Pour la
société, comme pour l’individu, il est impossible de régénérer
l’un sans régénérer l’autre, l’équilibre de la société
résultant de la force de chacun et inversement. Ce qui fait que si
nous voulons réformer la société, nous devons encourager le
dialogue entre tous ses éléments et toutes ses tendances. Mais pour
que ce dialogue soit utile et fructueux, pour qu’il ait du sens et
de l’essence, il faut qu’il soit franc et transparent.
Oui
nous avons besoin de la franchise et de la sincérité enseignées et
consacrées par toutes les religions célestes, notamment dans les
circonstances que nous traversons. Parler de ce qui se passe dans le
pays, de ses causes et des solutions proposées, ne peut se faire
qu’en dialoguant franchement loin de toutes fausses courtoisies ;
lesquelles, en l’occurrence, reviendraient pour la société à
faire la politique de l’autruche, car si la société faisait le
choix d’enfouir sa tête dans le sable cela reviendrait à enterrer
la patrie.
C’est
pourquoi je continuerai à vous parler en toute franchise, d’autant
plus que les circonstances font que la tâche est maintenant plus
facile qu’il y a deux ans et quelques mois. À l’époque
l’agression était si incroyable et la désinformation si énorme
que beaucoup de Syriens ont été dupés et sont tombés dans le
piège de l’incompréhension de ce qui se passait. Que nous
racontent-ils encore ? Chaque chose qui nous arrive est
reprochée à l’étranger ? Aujourd’hui, c’est tout le
contraire. C’est eux qui nous disent qu’il y a conspiration, et
c’est nous qui leur rappelons qu’il y a aussi des raisons
internes à cela.
Nous
devons voir les choses de nos deux yeux pour en imprimer une vision à
trois dimensions. Nous pouvons beaucoup discuter des choses liées à
la crise que nous traversons ; mais moi, je pars toujours des
questions posées par l’homme de la rue directement en ma présence
ou par l’intermédiaire de personnes qui me les rapportent. Je
pense que nous pouvons résumer toutes les questions en une seule :
« Quand est-ce que la crise prendra fin ? ». C’est
une question qui se pose depuis le début, voire depuis les premières
heures de cette crise en Syrie. Nous ne pourrons y répondre tant que
nous ne serons pas capables de préciser qui devra y mettre fin en
premier, puis comment… et ce n’est qu’ensuite que se posera la
question du quand.
Abordons
ce sujet selon une séquence logique. Celui qui mettra fin à la
crise c’est nous les Syriens, personne d’autre que les enfants de
cette patrie par eux-mêmes et de leurs propres mains. Il est vrai
que les facteurs externes sont fort puissants et influents.
Aujourd’hui, nous le savons tous. Mais aussi important que soit le
rôle de l’étranger, il n’est que catalyse ou obstruction. Il
peut allonger ou raccourcir la durée de la crise mais, comme nous
l’avons souvent dit et répété, il s’appuie sur nos propres
faiblesses.
Si
nous nous adressions à des étrangers, nous leur parlerions de tous
ces terroristes qui débarquent en Syrie, des dizaines de
nationalités étrangères qu’ils portent, du rôle joué par les
États arabes, régionaux ou occidentaux. Mais il se trouve que nous
nous adressons aux fils d’une seule et même société. Par
conséquent, lorsque nous mettons tous les facteurs externes de côté
et que nous constatons qu’il y a aussi parmi les Syriens, un
terroriste, un voleur, un mercenaire qui tue pour l’argent, un
extrémiste, pouvons-nous dire qu’il s’agit d’une importation
étrangère ? Non. C’est une fabrication de notre société.
Nous devons être clairs sur ce point. C’est l’une de nos
failles. Si ces individus n’avaient pas existé, les étrangers ne
seraient pas entrés en Syrie.
D’autres
spécimens existent. Je n’en citerai rapidement que quelques
exemples sans m’attarder sur les multiples détails de
« la grisaille nationale »… J’ai déjà évoqué
la « grisaille politique » lorsque j’ai dit que si tout
citoyen a le droit de choisir la nuance qui lui convient dans le
large spectre des options politiques, il n’en est pas de même
lorsqu’il s’agit de la patrie où il n’y a que deux choix
possibles : blanc avec la patrie ou noir contre la patrie !
Au début de la crise celui qui était dépourvu d’une conscience
nationale suffisante a pu opter pour le gris ou la grisaille
nationale devenue, en pratique, le giron du chaos et de la terreur.
Ses
multiples « incubateurs » ont alors lâché les monstres
dans l’arène. Aujourd’hui, nombre de ceux qui ont adopté cette
option ont compris leur erreur. Ils se sont ravisés pour revenir
dans le droit chemin. Ils sont revenus dans le giron de la patrie,
mais trop tard ! Les monstres avaient creusé leurs antres,
s’étaient multipliés et n’avaient plus besoin de « couveuses ».
Très vite, ils ont lancé d’autres monstres et ont même importés
quantité d’autres de par delà les frontières de la patrie.
Je
répète et j’insiste, ceux-là qui se sont égarés n’ont pas
intentionnellement fait fonction d’incubateurs. Ils le sont devenus
par ignorance. Certes, l’État fait partie intégrante de la
société, mais il n’en demeure pas moins que la société dispose
d’un plus large espace. Disant cela, je ne charge pas la société
pour nier la responsabilité de l’État. Non. Je veux dire qu’en
tant que membres d’une même famille, la famille syrienne, nous
sommes responsables à des degrés divers et selon la position que
nous occupons.
Sur
ce point précis, je dis que l’Histoire démontre que pas une
superpuissance n’a été capable de vaincre un petit État resté
solidaire. Je le dis, parce que devant l’ampleur de l’agression
extérieure, certains en sont arrivés à baisser les bras et à s’en
remettre à Dieu. Autrement dit, ils s’en sont remis au principe de
la délégation et non au principe de l’action, oubliant que c’est
lorsque nous faisons notre devoir que Dieu est de notre côté et que
la victoire est à nous. C’est pourquoi si nous avons suffisamment
conscience de ce point précis et que nous nous tenons ensemble, le
blanc contre le noir, je suis persuadé sans aucune hésitation ou
exagération que nous serons en mesure de sortir facilement de cette
crise, malgré et à cause du sang versé et du prix cruel que nous
avons payé.
C’est
en toute simplicité et avec le pragmatisme qui convient que je vous
répète que nous n’exclurons aucun moyen susceptible de nous
sortir de cette crise qui nous affecte tous et qui risque d’encore
plus détruire notre pays. C’est absolument ainsi que nous nous
comportons depuis le début et c’est ainsi que nous continuerons.
Il
y a ceux qui ont dit que le problème venait de la Loi, nous avons
modifié les lois ! Il y a ceux qui ont dit que le problème
venait d’un article de la Constitution, nous avons modifié toute
la Constitution et ceci après consultation référendaire ! Il
y a ceux qui ont fait de mauvaises propositions par manque de
compétences ou ignorance, et ceux qui les ont posées par hypocrisie
ou mauvaise foi… Malgré cela nous en avons tenu compte partant du
principe que l’État ne doit pas négliger une solution proposée
par un Syrien convaincu qu’elle pourrait améliorer la situation.
Puis,
il y a toutes les solutions qui sont venues de l’étranger. Nous
les avons traitées de la même manière, sans cependant perdre de
vue la souveraineté de la Syrie définitivement non négociable.
Cette restriction étant précisée, nous avons clairement annoncé
que nous ne refuserons aucune initiative et nous avons commencé par
accepter « l’Initiative arabe ». Nul parmi vous
n’ignore les intentions cachées des principaux États concernés
qui ont exigé l’envoi d’une mission d’observateurs avec
laquelle nous avons coopéré et qui s’est soldée par un échec.
Suite
à cette première Initiative qui n’a pas réussi à condamner la
Syrie dans les termes prémédités par les États arabes en
question, M. Kofi Annan est venu, accompagné des observateurs
onusiens. Là aussi, nous avons coopéré et cette deuxième
initiative a abouti un à nouvel échec toujours fomenté par des
États de la Ligue arabe. Ensuite, nous sommes passés à
« l’Initiative de Genève » et à M. Lakhdar Brahimi.
De nouveau, nous avons coopéré et annoncé que nous nous rendrions
à Genève en sachant parfaitement avec qui nous aurions à négocier.
On dit qu’une personne ne représente qu’elle-même, mais ces
gens là n’en sont même pas capables et ne représentent que les
États qui les ont créés, qui les payent, et qui leur dictent ce
qu’ils doivent faire ou ne pas faire.
Nous
avons donc dit que nous irions dialoguer avec ceux-là qui, comme
vous le savez, prétendent représenter le peuple syrien tout en
appelant à une intervention étrangère. Ce n’est pas disserter
que de dire que lorsqu’on est soutenu par la force du peuple, nul
besoin d’aide étrangère. Contre cela, leur argument devient
« l’armée tue le peuple », comme s’il existait un
seul exemple étayant l’idée que dans un tel cas de figure l’armée
ne s’écroulerait pas aussitôt. Une armée du peuple, issue du
peuple, ne s’importe pas de l’étranger ni ne se fabrique dans
leurs officines.
Si
nous avons réellement coopéré, ce n’était ni par naïveté, ni
parce que nous nous faisions des d’illusions, mais d’abord et
avant tout parce que nous croyons en l’action politique. C’est là
une conviction à condition que les intentions sous-jacentes aux
déclarations soient sincères. D’ailleurs, nous reconnaissons
qu’un certain nombre de pays qui ont collaboré aux initiatives
successives ont sincèrement travaillé à trouver une solution, mais
ils n’ont pas réussi à l’emporter sur le terrain de la
réalité.
Néanmoins,
répondre favorablement à ces initiatives était nécessaire pour
aider certains Syriens à découvrir une vérité cachée qui leur
avait échappé et qui veut que l’action politique et la solution
politique soient deux choses distinctes, cette dernière étant plus
globale, car si l’action politique peut aider à la solution, elle
n’est pas la solution. Elle fait partie de la solution.
D’autre
part, répondre favorablement à ces initiatives était nécessaire
pour permettre aux Syriens dupés ou égarés de découvrir toutes
les autres vérités de la situation et aussi pour permettre à ceux
qui, comme dans toute société, ne raisonnent qu’avec des
hypothèses et des si… « Si vous aviez agi autrement,
nous n’en serions pas là ! »… Des suppositions à
n’en plus finir jusqu’à ce que les hypothèses deviennent
réfutables, pour la bonne raison qu’elles ne correspondent pas à
la réalité.
Plus
important encore, cette souplesse syrienne a aidé les amis de la
Syrie du monde entier, que ce soit des individus, des partis ou des
pays à pouvoir travailler à la défendre dans les différents
forums. Mais malgré leurs performances, je n’ai pas cherché à
nourrir les illusions parce que les données concrètes dont nous
disposions n’étaient pas en faveur du succès de leurs entreprises
et que la partie adverse refusait toute solution politique. Ainsi, à
chaque fois que nous avons répondu favorablement à une proposition
elle versait dans la dépression, voire l’hystérie comme ce fut le
cas de certains pays arabes en particulier.
Il
n’empêche qu’avec le temps et malgré les vents contraires,
notre attitude a fini par faire tomber les masques de tous ces
responsables qui s’acharnaient à prétendre que l’État syrien
ne cherchait qu’à détruire le pays et même à qualifier de
terrorisme la solution sécuritaire qu’il a adopté, comme si le
terrorisme pouvait se régler par la politique ! Je ne pense pas
qu’une personne saine d’esprit puisse le croire, la politique
pourrait éventuellement jouer son rôle avant qu’il n’apparaisse.
Ce qui nous ramène à la prévention par l’éducation, le
dialogue, l’économie performante, les services sociaux… Les
moyens sont nombreux, mais une fois que le terrorisme est apparu,
s’est répandu, et a commencé à détruire et à assassiner la
seule solution est de le frapper d’une main de fer !
Il
est important de comprendre que le terrorisme et la politique sont
absolument antagonistes. Il n’est pas possible de s’engager dans
une voie politique alors que le terrorisme frappe partout où il
peut. Il est impératif de le frapper pour que la politique puisse
correctement suivre son cours. Cela n’empêche pas d’emprunter
cette voie parallèle de la politique, à condition qu’elle ne
serve pas de prétexte à arrêter le combat contre le terrorisme !
Par
conséquent, si nous voulons trouver une solution nous devons partir
des faits et non des illusions, comme c’est le cas de certains.
Nous pouvons comprendre que dans ces conditions difficiles ils
puissent en arriver à se raccrocher à des vétilles. Mais l’État
ne peut pas se comporter de la sorte et entrainer la société dans
sa chute. L’État doit traiter avec la réalité.
Et
la réalité, c’est aussi la situation internationale avec d’une
part des États amis et honnêtes ayant adopté à notre égard une
position invariable basée sur leurs principes qui se trouvent être
compatibles avec leurs intérêts, ce qui est excellent ; et
d’autre part, des États ennemis et perdus après avoir mal estimé
la situation et avoir compté sur des agents qui les ont encore plus
induits en erreur, si bien qu’ils se retrouvent aujourd’hui
complètement déséquilibrés.
Quant
à la situation régionale au bout de ces deux ans et demi, la
majorité des États de la région ont désormais une vision
différente et presque claire de la réalité à l’exception de
quelques-uns, peu nombreux, qui ont adopté la doctrine wahhabite et
l’idéologie des Frères Musulmans. Ceux-là ont versé et
continueront à verser le sang syrien parce qu’ils considèrent que
ce qui se passe en Syrie est une occasion unique qui consacrerait
leurs doctrines dévoyées et assassines, d’où leurs déclarations
hystériques suite à la nouvelle donne internationale.
Ce
qui fait qu’à l’échelle nationale nous avons toujours à
combattre les gangs coupeurs de têtes et de revenus ou des deux à
la fois, des mercenaires payés de l’intérieur ou de l’extérieur,
des voleurs, des repris de justice en fuite depuis des années, des
extrémistes religieux selon l’appellation consacrée mais qui
n’ont rien à voir ni avec la religion, ni avec l’Islam.
Nous
avons aussi une opposition syrienne nationale qui s’est impliquée
dès le début de la crise dans l’action politique et patriote,
certains de ses représentants sont présents dans cette salle. Mais
il existe une autre opposition qui ne travaille pas dans l’intérêt
de la patrie mais pour ses propres bénéfices. Certains de ses
représentants se sont empressés de nous provoquer en demandant des
postes dans les institutions d’État et au gouvernement contre
l’arrêt des manifestations, alors qu’ils n’avaient aucune
réelle influence sur quoi que ce soit !
D’autres
se sont fait grassement payer par les pays du Golfe directement ou
indirectement par l’intermédiaire de fonctionnaires de la Ligue
arabe pour qu’on ne dise pas quel était l’État payeur. Ensuite,
ils se sont mis à courtiser les bandes armées et à accuser l’Etat
de terrorisme plutôt que de les condamner. Leurs prises de positions
ont souvent changé en fonction de l’évolution de la situation
sécuritaire et militaire sur le territoire national et au gré de la
situation internationale.
Aujourd’hui,
certains refusent le dialogue, d’autres disent l’accepter mais en
secret s’attirant pour cela les foudres de leurs comparses. Au
total, il ne faut rien attendre de cette deuxième opposition de
façade, elle est perdante tant du point de vue moral que du point de
vue populaire et n’a aucun rôle à jouer dans la résolution
politique de la crise.
Disant
cela, je n’agresse pas une personne en particulier. Dans aucun de
mes précédents discours, je n’ai attaqué l’opposition. Mais
nous ne pouvons franchement pas aborder la situation intérieure sans
donner à voir au citoyen syrien toutes les données qui existent
réellement sur le terrain. Je dis que je n’agresse personne, parce
que si je le voulais je pourrais citer des noms… Je me contente
d’exposer des faits.
Mais
en fin de compte, malgré la souplesse et le pragmatisme du
gouvernement syrien, rien de ce qui a été entrepris de l’intérieur
ou de l’extérieur n’a amélioré la situation. L’escalade
continue, et chaque Syrien quelle que soit son affiliation politique,
géographique, ethnique, religieuse… en paye le prix. Les massacres
ambulants fauchent toujours la vie des Syriens. Inaugurés à Jisr
al-Chogour, ils sont passés par Karm el-Zeytoun, Hatla, Khan
al-Assal, et tant d’autres endroits… La cause est désormais
entendue et très claire pour tous : la Syrie sera ou ne sera
pas, elle restera libre et indépendante ou sera aux bottes de
l’ennemi, elle restera gouvernée par un État de droit et des
institutions ou deviendra un état dirigé par des voleurs et bandits
de grand chemin.
La
confrontation est entre la patrie et ses ennemis, entre l’Armée et
les terroristes, entre l’État et les hors-la-loi. À ce titre,
absolument aucune autre annonce n’est désormais acceptable. Nous
ne pouvons plus témoigner de notre complaisance aux égarés et aux
inconscients. Ce serait, sans exagérations, laisser détruire à
jamais l’identité culturelle syrienne et notre tissu national.
Nous Syriens devons être pleinement conscients que dans ces combats
nous gagnerons ensemble ou perdrons ensemble. Il n’y a pas d’autres
alternatives.
Nous
avons tout essayé, et il ne nous reste plus qu’une seule option,
celle de nous défendre et de défendre notre pays par nous-mêmes.
Naturellement, tous les Syriens attendent beaucoup de leur Armée
nationale. Tous fondent leurs espoirs sur sa force. Tous espèrent
que cette institution pourra mettre fin à cette situation
aujourd’hui avant demain. Tous espèrent que le combattant syrien
sera suffisamment puissant pour écraser les terroristes. Mais nous
savons tous que la réalité est plus dure à vivre que le rêve.
Ce
que nos Forces armées ont accompli relève presque de l’impossible.
Cette institution née au lendemain de l’Indépendance, et surtout
suite à la création d’Israël, a été formée pour la défense
de la patrie contre ce seul ennemi, contre un seul front de longueur
et de profondeur bien délimitées. Ses structures combattantes, ses
tactiques, sa stratégie, son armement n’avaient pas d’autre
objectif. Tout à coup, la voilà qui doit faire face à quelque
chose de différent, quelque chose que très probablement aucun autre
État et aucune autre armée de l’Époque moderne n’a eu à
affronter. Elle se devait de s’y adapter le plus rapidement
possible et en pleine bataille, et ce fut le plus dur ! Mais
elle l’a fait avec brio et a réalisé des percées très
importantes sur tous les terrains.
L’Histoire
et les romans historiques regorgent d’actes héroïques qui
néanmoins restent exceptionnels. En toute honnêteté, sachez que le
nombre d’actes héroïques accomplis par nos Forces armées est
difficilement croyable, tant au niveau opérationnel qu’au niveau
des sacrifices consentis. Savoir qu’on va à la mort, y aller,
exécuter sa mission, risquer d’être blessé… Nombreux sont les
officiers, et les simples soldats qui après leur convalescence d’une
première blessure, sont repartis au combat une deuxième, une
troisième, une quatrième fois ; avec à chaque blessure encore
plus de détermination. Certains d’entre eux combattent toujours,
alors que d’autres sont tombés. Oui l’héroïsme est un
symbole !
Mais
si nous voulions opter pour un seul symbole, nous pourrions
difficilement le choisir tant les actes héroïques sont nombreux.
Qui le pourrait ? C’est la vérité et nous devons en être
fiers aujourd’hui et pour des générations à venir. Certes, nous
savions que nos soldats étaient courageux, mais nous n’avions pas
imaginé jusqu’où ils iraient dans leur héroïsme. Bien sûr,
leur performance reflète celle du peuple Syrien étant donné que
l’institution militaire est issue de ce peuple et n’est pas
isolée de la société syrienne. Si donc vous me demandiez d’évaluer
nos Forces armées je vous répéterais qu’elle a presque atteint
l’impossible dans les conditions les plus dures d’une agression
menée par diverses grandes puissances et leurs agents et leurs
terroristes !
Si
maintenant nous cherchions à répertorier les exploits de nos
combattants sur une carte de la Syrie, nous constaterions des
différences d’une région à l’autre, car dans une bataille les
facteurs en jeu sont multiples. Il y a le facteur humain lié aux
officiers et aux soldats eux-mêmes, il y a l’environnement lié à
la géographie et à la technicité militaire, etc… Il est donc
normal qu’existent des variations régionales, mais le plus
important reste le facteur populaire. J’en suis d’autant plus
convaincu que, bien avant la crise en Syrie, lorsqu’on me parlait
de la victoire de la Résistance libanaise, de ses tactiques et de
ses armes, je répondais invariablement que la Résistance avait
vaincu grâce à son peuple. Aujourd’hui, nous retrouvons
cette même vérité en Syrie.
Ce
soutien populaire est partout présent dans le pays. Nous l’avions
constaté dès les premiers jours du combat mené par les Forces de
l’armée nationale contre les terroristes. Ce soutien se renforce
de jour en jour parallèlement à la prise de conscience de plus en
plus aigüe de la population. Désormais, il y a une quasi-unanimité
qui évidemment conforte le moral du combattant. Ne dit-on pas que le
moral des combattants est pour moitié dans la bataille ? Mais
même si nous admettions que ce soutien ne concerne que les trois
quart ou la moitié de la population, il n’en demeure pas moins que
les résultats sont là avec un taux de réussite d’autant plus
significatif qu’un soutien logistique était présent.
La
guerre à laquelle est confrontée l’Armée arabe syrienne et nos
Forces armées en général, est une « guérilla ». La
majorité des gens savent que c’est l’une des guerres les plus
difficiles et les plus dangereuses pour n’importe quelle armée,
aussi puissante soit-elle. Un seul autre type de guerre la dépasse,
c’est la « guerre populaire » menée à la fois par le
peuple et l’armée. C’est ce qui se passe en Syrie et qui nous a
réussi jusqu’ici.
En
cette année 2013, les forces ennemies ont senti qu’elles n’étaient
pas en mesure de remporter la victoire décisive qu’elles
escomptaient. Il y a eu quatorze batailles pour la libération de
Damas avant le Ramadan, et trois ou quatre autres batailles
l’année dernière. La semaine dernière il y a eu la bataille de
Badr, et hier celle d’Ababile… À chaque fois, les forces
ennemies ont perdu, c’est pourquoi les États concernés sont
arrivés à la conclusion qu’ils n’obtiendront pas ce qu’ils
cherchent. Leur restait la solution de la « guerre
d’usure », celle qui prolongerait la crise, celle qui
rongerait et saignerait la Syrie. Pour eux c’est désormais la
solution qui reviendra au même indépendamment de la chute de l’État
syrien et c’est ce qu’ils ont décidé de poursuivre !
De
notre côté, il ne nous reste plus que « la guerre
populaire » dont je viens de parler. Il est vrai que la
bataille fait rage dans les médias, sur les sites des réseaux
sociaux, et même au sein de la société réelle ; mais la
bataille décisive ne s’emporte que sur le terrain. Les difficultés
économiques que nous endurons, le recul des services publics et
privés et tous nos soucis de la vie quotidienne en tant que Syriens,
sont liés à la situation sécuritaire. Nous n’avons pas d’autre
solution que de frapper le terrorisme. Si nous réussissons à
intégrer encore plus de régions, et si nous gagnons notre guerre
populaire, la solution sera facile et la Syrie pourra sortir de la
crise en quelques mois avec la grâce de Dieu. C’est une autre
vérité. Je n’exagère pas.
Maintenant,
si les média entendent ce discours, ils se précipiteront pour dire
que le Président syrien a appelé le peuple à la guerre populaire…
Nous n’appelons pas à la guerre pour la bonne raison que cette
guerre a commencé il y a plus d’un an et qu’elle se déroule sur
le sol syrien ! Je mets les points sur les « i »
pour que les choses soient bien claires. Comment pourrions-nous
mettre fin à cette guerre et « renverser la table » sur
les autres pour rétablir la stabilité et la sécurité, la Syrie
ayant été avant qu’ils ne débarquent un modèle de sécurité
non seulement au niveau du monde arabe et du Moyen-Orient mais au
niveau du monde entier ? Nous n’avons plus que cette solution,
celle d’unir l’armée et le peuple pour éliminer le
terrorisme. Je n’ai pas inventé cette idée, elle est issue de
notre expérience. Dans les provinces où nous l’avons mise en
application, elle a réussi à des degrés divers, mais elle a
réussi !
Puisque
nous sommes réunis en cette « Nuit du Destin » de la
dernière semaine du Ramadan, le mois du pardon, nous ne pouvons pas
ne pas rappeler ce que j’ai dit et répété à plusieurs
occasions. La Syrie en tant qu’État ne cessera pas de suivre cette
voie parallèlement à la frappe du terrorisme, mais le pardon sera
réservé à ceux qui ont été trompés, non à ceux à qui ont
versé le sang, commis des assassinats et des actes terroristes. Au
début, cette réserve a été refusée par beaucoup de Syriens qui
pensaient qu’elle ne pouvait qu’encourager le terrorisme. Mais
après une si longue période de crise, je peux dire que cet acte de
pardon a donné de bons résultats sur le terrain. Le résultat n’est
pas garanti à cent pour cent car il y a toujours quelqu’un de prêt
à revenir vers la déviance et la traitrise. Il n’empêche que
dans la majorité des cas les efforts sont couronnés de succès.
De
temps à autre, vous entendez les médias parler de personnes qui se
sont rendues aux autorités compétentes et ont régularisé leur
situation. Là aussi le pourcentage de réussite est en nette
augmentation, ceci parce que la confiance dans l’État s’est
renforcée. On leur disait de ne surtout pas se rendre parce que
l’État se vengerait. Mais l’État syrien a prouvé qu’il
protégeait tous les Syriens quelle que soit leur appartenance
politique.
Et
aujourd’hui, avec le déclin des « couveuses » le
tableau est devenu moins sombre. Dans certaines régions, des jeunes
gens qui s’étaient rendus et avaient déposé les armes se sont
engagés dans les premiers rangs de nos Forces armées et sont tombés
au combat. Ils sont morts en héros non en criminels, la nuance étant
importante ici-bas et dans l’au-delà.
Je
suis convaincu que nous devons continuer à encourager au pardon et
au dialogue en les associant aux initiatives sociales et politiques
menées par un certain nombre de Syriens, parce qu’elles se sont
révélées essentielles à la réussite des deux à la fois. Nous
avons, nous-mêmes, procédé de cette manière après avoir accordé
de nombreuses amnisties sans nécessairement les rendre publiques. Ce
n’est donc pas une question de publicité mais une question
d’action sur le terrain.
Là
aussi les résultats ont été bons. C’est pourquoi j’insiste à
soutenir ces initiatives sans relâche, car ce qui ne pourra
s’accomplir aujourd’hui le sera demain. Et c’est pourquoi
j’encourage à rentrer chez eux les nombreux indécis qui disent
vouloir s’en sortir et retourner à leur vie, mais qui ne le font
pas parce qu’ils ont peur. Je les encourage à regagner leur place
naturelle sans crainte. Sinon, le combat sera sans fin, nous serons
les perdants avec pour seul gagnant l’ennemi israélien.
Nous
sommes dans le mois du bien, c’est à nous de l’atteindre. Dieu
nous a offert le bien, mais si nous le voulons nous sommes tenus de
le chercher. Mais alors il faut que nous sachions que nous ne pouvons
le trouver au mauvais endroit. Le bien ne nous viendra pas de
certains pays arabes ou régionaux qui disent se soucier du moindre
petit village syrien, mais restent très rassurés sur le statut de
Jérusalem et l’avenir des enfants palestiniens sous occupation
israélienne. Le bien ne nous viendra pas de ces pays qui se
disent impatients d’offrir la démocratie au peuple syrien,
mais qui privent leurs peuples du minimum de droits humains et qui
sont déterminés à leur infliger des systèmes politiques du
Moyen-Âge et probablement de l’époque de l’ignorance
[Al-Jâhilîya], sans parlement, sans partage des décisions, sans
partage des richesses ni même de la patrie, sans partage de quoi que
ce soit
.
Ces
pays veulent entrer dans l’Histoire… Ils y entreront
certainement, mais dans un sous-chapitre intitulé : MORT,
DESTRUCTION, ARRIÉRATION, IGNORANCE. Ce sont pratiquement les seules
qualités historiquement présentes chez eux et les seuls cadeaux
qu’ils peuvent offrir à l’humanité. Non, le bien ne nous
viendra pas de la pensée de ces obscurantistes, fondée par les
wahhabites par le feu et le sang puis politisée par les Frères
Musulmans par la violence, l’hypocrisie et le crime.
Leur
pensée obscurantiste a semé la discorde entre l’arabité de
l’Islam, alors que le Coran et le Prophète les avaient unis. Ils
sont les premiers à semer la discorde entre le musulman et le
musulman, puis entre le musulman et le chrétien, au moyen de
leur confessionnalisme détestable et meurtrier que toutes les
religions célestes ont condamné.
C’est
cette même pensée qui a inversé le conflit arabo-israélien en
conflit arabo-arabe. Ils ont frappé les symboles de l’arabité et
de la résistance au colonialisme. Ils ont attaqué les armées
arabes comme cela se passe maintenant en Syrie et en Egypte. Ils ont
collaboré avec l’armée de l’ennemi israélien. Ils ont trahi
dans l’intérêt d’Israël et se sont laissés humilier par les
États-uniens pour se garantir un simple siège, leur seul intérêt.
Comment
les désigner ? Ce sont les « néo-islamistes » !
Les Occidentaux ont utilisé les « néo-chrétiens »
pour servir Israël en usant du christianisme, et les voilà qui
utilisent ces « néo-islamistes » pour qu’à travers eux l’Islam
soit consacré au même service. À vrai dire, le terme
« islamistes » n’est pas correct, nous ferions mieux de
les désigner par le terme « néo-ignorants », plus
proche de la vérité.
Le
bien ne nous viendra pas de ceux-là. Il nous viendra de toutes ces
nobles personnes qui se sont dressées partout dans le Monde, aussi
bien dans le Monde musulman que partout ailleurs. Elles se sont
tenues à nos côtés en parole et en action. Elles ont hissé le
drapeau syrien. Elles ont soutenu l’Armée arabe syrienne dans ses
combats contre le terrorisme. Elles ont soutenu le peuple syrien qui
défend l’indépendance de son pays.
Le
bien nous viendra de vous les Syriens ! Il viendra de
tous les Syriens chrétiens et musulmans concernés par leur
appartenance à ce pays et qui se sont engagés en toute
conscience, convaincus que les religions et les lois célestes ne
sont descendues que pour un seul objectif, celui de rendre notre vie
meilleure. Par conséquent, lorsque ces lois et religions échouent à
nous rendre meilleurs et qu’au contraire nous allons vers le pire,
le problème n’est pas dans la religion, le problème est en nous.
Le
bien nous viendra de ces héros qui valorisent leur patrie et
défendent leur peuple. Il viendra de leurs familles qui souffrent
patiemment de leur absence pendant qu’ils se battent sur le champ
d’honneur, et de leurs parents qui y ont envoyé un deuxième fils
pour terminer la mission du premier qui est tombé. C’est de
ceux-là que le bien nous viendra, de leur force, leur ténacité,
leur foi et leur patriotisme.
Je
termine en souhaitant qu’au prochain Ramadan la Syrie aura récupéré
sa santé, que la paix et la sécurité règneront sur ce pays cher à
nos cœurs. Et à l’occasion d’Id al-Fitr qui nous arrivera dans
les prochains jours, je vous dis « Puisse chaque année à
venir vous apporter la paix ».
Dr
Bachar al-AssadPrésident
de la République arabe syrienne04/08/2013
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